Editorial
Pourquoi ou comment? |
Juin 2003 |
A quel type de question tente de répondre la Science: à la question du "comment" ou à celle du "pourquoi"?
Cela a été un débat à la mode en un temps, et il n'y a probablement pas de réponse claire et nette, tout simplement parce que le vocabulaire est trop flou. En d'autres termes, la question est sans doute mal posée.
"Comment" a une certaine connotation descriptive: "Comment vivaient les dinosaures?", "comment se propage la lumière?..." On attend de ce type de question, une narration d'observations, ou un compte rendu de suppositions. Il semble donc que ce soit une partie de la démarche scientifique: soit une forme d'introduction à une recherche d'informations, soit un aboutissement, un bilan d'observations.
"Pourquoi" est peut-être plus ambigu. Dans le langage courant "Pourquoi faites vous cela?" peut-être synonyme à la fois de "Dans quel but?..." ou de "Pour quelle raison?...". On pourrait donner alors une réponse du genre cause ou bien du genre conséquence... Les scientifiques ne s'aventurent pas (d'habitude) à tenter de donner un but aux phénomènes qu'ils observent, sauf par abus de langage. Par exemple, lorsqu'on observe que les oeufs de certains oiseaux marins pondant sur des rebords de falaises sont de forme très coniques, on entend parfois dire que c'est dans le but d'éviter qu'ils ne tombent. En effet puisqu'en roulant, ils pivotent et se placent la pointe en haut, cela leur interdit de rouler davantage. Bien sûr, ces oiseaux ne confectionnent pas sciemment leurs oeufs dans cet objectif. L'évolution Darwinienne nous a appris que les espèces d'oiseaux pondant ce genre d'oeufs étaient avantagées par rapport aux autres. La sélection naturelle a donc trié et conservé cette caractéristique favorisant les individus et ainsi l'espèce.
Finalement le "Pour quelle raison?" est peut-être le mieux placé à propos de la richesse en contenu. En tentant de répondre à une telle question, on balaie une grande partie de la méthodologie scientifique. En effet, il nous faut d'abord confirmer l'observation, éventuellement de plusieurs façons différentes. Ensuite, il faut trouver un lien causal, une raison en fait, expliquant que ce phénomène se produise tel qu'on l'observe. Et enfin, il faut vérifier la raison invoquée, en testant toutes les conséquences que l'on peut en tirer. Si certaines des conséquences ne se vérifient pas, il peut être nécessaire à ce moment de trouver une meilleure raison.
C'est cette démarche, me semble-t-il, qu'il est important de faire apprécier aux élèves et étudiants en Sciences. Cela permet d'éviter de penser que décrire la Nature, c'est la comprendre. Inventorier et classifier le contenu de notre Univers est une étape inévitable, mais le raisonnement scientifique lui donne un sens en tissant les liens existants entre tous les éléments observés.
PhB