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        J'ai vu le spectre de Brocken. Où est l'exorciste le plus proche?

       Voilà un titre un peu accrocheur, d'une rigueur peut-être un peu douteuse cependant... Expliquons:

Le Brocken est une montagne de 1400m d'altitude, dans le Nord de l'Allemagne, au sud de Hanovre. Elle est ici, si vous manquez d'idée pour vos prochaines vacances.

Le spectre de Brocken a été décrit pour la première fois par le naturaliste Johann Silberschlag en 1780 (d'après le traditionnel Wikipédia).

Lors de l'observation, les conditions météo étaient particulières: grand Soleil, mais des nuages et des brumes se situent à proximité du sommet, juste en dessous de l'observateur. Celui-ci tourne le dos au Soleil et découvre un étrange phénomène, dont voici une image, prise par Robert. Ce n'était pas au Brocken, mais ça marche ailleurs aussi:

Spectre de Brocken et gloire ©Rob In Space

Etonnant non? En réalité, sur cette image, deux phénomènes sont cumulés: un spectre de Brocken et une gloire. Voici la version légendée:

Brocken et gloires légendées ©Rob In Space

Le spectre doit être compris comme un synonyme de fantôme ici, et non pas comme le résultat de la dispersion de la lumière: en effet, le spectre est ici l'ombre de Robert! La Gloire résulte d'un phénomène très différent. Et si je vous avais montré la photo prise par Ginette, vous constateriez que ce serait elle le centre de la Gloire!

Le spectre en lui-même est facile à comprendre: ce n'est rien d'autre que votre ombre qui se profile sur les goutelettes du brouillard situé devant vous. Si le banc de brume vient jusqu'à vos pieds, l'ombre prend un relief surprenant. Voir bouger ce spectre imitant vos mouvements a dû ébahir bien des observateurs.

La Gloire est bien plus complexe, et le phénomène n'en est pas encore parfaitement compris. Seules certitudes, il ne s'agit pas d'un phénomène de réfraction et de dispersion de la lumière, comme dans le cas d'un arc en ciel, mais d'une réfraction suivi de diffraction et d'interférences...

En effet, les rayons solaires pénètrent d'abord dans la goutte où ils sont réfractés, subissent une réflexion totale, et reviennent vers nous. Ce qui rend compte du centre lumineux de la Gloire.

Cependant, les calculs habituels faisant intervenir la réfraction montrent un angle de sortie incompatible avec la réalité. Il faut alors ajouter un phénomène d'ondes de surface, où les rayons, sur de très courtes distances, longent la surface de la goutte... De plus, la taille très faible des gouttelettes conduit à de la diffraction. Et comme, les faisceaux sortant de chaque goutte interfèrent entre eux: chaque anneau coloré montre ainsi les couleurs pour lesquelles les ondes étaient en phase... Pas si simple donc...

Une petite mesure amusante (enfin, si on veut...) est possible: les modèles théoriques prédisent un lien simple entre le rayon angulaire des anneaux colorés et la taille des gouttes. Comme dans tout phénomène de diffraction, la largeur des anneaux est inversement proportionnelle à la taille des gouttes. En particulier, ici:

Rayon du 1er anneau rouge en degré(s) = 24 / rayon de la goutte en µm

Si on évalue la largeur du champ de l'image du haut de cette page à 60°, l'anneau rouge aurait environ 6,5° de rayon, ce qui conduit à des goutelettes de 3,7µm, donc environ 4µm. On a de minuscules gouttes qui révélent un brouillard à peine en formation... Il nous en apprend des choses, ce spectre!