La Voie Lactée: qu'est-ce que c'est?...
Voir quelques étoiles en ville relève de plus en plus de l'exploit. La Voie Lactée est quasiment en train de se transformer en légende transmise par les vénérables aïeux à leurs petits enfants: "Dans le ciel, quand j'étais petit, on voyait un long ruban scintillant... Bon, si tu lâchais ton joystick quand je te cause..."
Ne déprimons pas, partons en campagne ou mieux, en montagne la nuit, idéalement en été. Si le ciel est clair, vous la verrez, presque nord sud et passant par le zénith. Si, en plus vous avez une paire de jumelles (de 7x50 ou 10x50 par exemple), confortablement allongé dans l'herbe, vous serez probablement fasciné par les nuées d'étoiles, d'amas et de nébuleuses qui la saupoudrent.
La voici, telle qu'on pourrait
la voir depuis les régions inter-tropicales ©Mellinger |
Selon certains, Héraclès (ou Hercule), encore petit, mais déjà glouton, têtait Héra un peu violemment. Une giclée du lait de la déesse marqua le ciel à jamais.
Vos observations aux jumelles vous donne déjà un début raison à la présence de cette bande: la luminosité diffuse est causée par la très forte densité d'étoiles faibles situées dans cette zone. Mais pourquoi là? Et pourquoi en forme de ceinture tout autour de nous?...
Il semble bien que les étoiles ne goûtent guère la solitude. Elles se groupent en de gigantesques amas, aux formes diverses: des galaxies. Certaines peuvent être elliptiques plus ou moins aplaties, d'autres en forme de disque à bras spiralés, d'autres, en tas informes. Notre Soleil à nous, avec ses 100 milliards de copines, est niché dans une galaxie spirale, du genre de celle-ci:
Un de ses noms est M81, ou galaxie
de Bode, à environ 12 millions d'années lumière de
nous. ©HST |
Vue de côté, une
galaxie spirale est très plate. Ici, c'est NGC4565, à environ
31 millions d'années lumière de chez nous... Typiquement,
un tel objet fait 100 000 années lumière de diamètre. |
Le Soleil n'est pas du tout au-centre de notre Galaxie (vous avez remarqué? avec un "G"...), mais à pas loin de 30 000 AL de celui-ci, dans la zone "pavillonnaire" pourrait-on dire. Et comme nous sommes dans le plan du vaste disque galactique, on voit beaucoup plus d'étoiles en regardant dans la direction de ce plan que perpendiculairement à lui. Un petit schéma pour l'illustrer:
Robert, dans sa galaxie, voit
plus d'étoiles dans son plan que dans d'autres directions. |
Mais vous êtes tout à fait en droit de vous demander d'où viennent toutes ces jolies connaissance encyclopédique, non?...
En effet, reconstituer notre Galaxie en trois dimensions, sans pouvoir l'observer de l'extérieur est particulièrement délicat: comment faire le plan de la maison dans laquelle vous habitez si vous ne l'avez jamais vue de dehors. Certes, on peut se faire une idée en observant les maisons des voisins par la fenêtre, comme le suggèrent les photos précédentes, mais il faut pouvoir faire mieux. C'est Harlow Shapley, au début du XXème siècle qui s'y est attaqué, mais Herschel à la fin du XVIIIème s'y était essayé aussi:
Voici d'ailleurs le plan qu'il
en a fait: la grosse étoile au milieu est la notre: et oui, encore
au centre de l'Univers connu... |
Voici l'idée de Shapley: Il existe deux sortes d'amas d'étoiles, les "ouverts" et les "fermés?"... non, raté, les "globulaires". On sait aujourd'hui que les premiers sont constitués d'étoiles plutôt jeunes, au contraire des seconds qui contiennent les étoiles les plus vieilles de l'Univers. Voici leur portrait:
M35, un amas ouvert dans les Gémeaux. |
M13, un amas globulaire dans Hercule. |
Comme vous voyez, pas besoin d'un oeil d'aigle pour percevoir une subtile différence entre les deux...
Quand on observe la distribution des ces deux types d'amas sur le fond de ciel, de grosses différences sautent aussi aux yeux:
Voici la répartition de
plus de 1000 amas ouverts sur la voute céleste:
l'axe horizontal est l'axe de la voie lactée (coordonnées
galactiques) |
Et voilà la répartion
de 150 amas globulaires dans le même système
d'axes... |
Qu'en déduire? Tout d'abord, que les amas ouverts font bien partie de notre galaxie et sont majoritairement situés dans son plan. Ensuite, les amas globulaires, eux, ont une distribution à symétrie sphérique, centrée sur "quelque chose" situé dans la constellation du Sagittaire: ce "quelque chose" est, vous l'avez deviné, le centre de la Galaxie.
Il ne reste plus qu'à utiliser les amas globulaires pour déterminer à quelle distance de nous se trouve ce fameux centre galactique. Mais pour celà, il faut déterminer la distance de ces amas: c'est l'énorme tache que s'était choisie Shapley. Ces amas, heureusement, contiennent des étoiles variables (des Céphéïdes et des RR Lyrae en langage "technique"), qui peuvent servir de jalon de distances. Voici les mesures originales de notre Astrophysicien:
Le Soleil est au milieu du cercle
vert. Vers la droite, c'est vers le Sagittaire. Le centre galactique est
évalué à 30 000* parsecs de là (1 parsec =
3,26 AL), au centre de la répartition des amas. Une autre révolution
Copernicienne, le Soleil n'est vraiment plus au centre de grand chose...
(*La valeur moderne est de 8000 pc.) |
Notre Galaxie est donc un vaste disque, dont le centre est en direction du Sagittaire. Ce disque est-il spiralé? Apparemment oui: Cinq ou six bras ont été détectés, et nous serions dans la courbure de l'un d'entre eux:
Et il semblerait même que la partie centrale de notre Galaxie possède une barre, ce qui donnerait cette tentative de portrait:
Mais il reste encore bien des choses à découvrir à propos de notre environnement galactique: qu'est-ce qui se passe en son centre? Comment se comporte le gigantesque trou noir qui s'y trouve caché? Quelle est cette matière obscure qui influence la rotation de notre Galaxie?...
Toujours des questions...