Qu'est-ce qu'une parallaxe ? On en a de multiples exemples dans la vie quotidienne; si l'on observe une mouche immobile sur une vitre, on la voit se superposer à un arbre de l'autre côté de la fenêtre.
Il suffit de se déplacer de côté pour qu'elle ne se trouve plus en face du même point du paysage; tout cela, c'est à cause de la parallaxe. On se doute que plus la "base" (la distance AB) est grande, et plus l'angle de parallaxe est grand. En Astronomie, ce qui jouera le rôle du "paysage" sera le fond d'étoiles lointaines et c'est le déplacement apparent de l'objet observé par rapport à ce fond d'étoiles qui donnera la valeur de cet angle parallactique. Tycho Brahé utilisa le premier cette technique en 1577 pour tenter de mesurer la distance d'une comète. Pour cela, il utilisa une base de 600km, lui à une extrémité, un de ses collègue à l'autre, et ils en déduisirent que cette comète se trouvait à plus de 6 fois la distance Terre-Lune. Mesure d'autant plus importante, qu'en accord avec Aristote on pensait alors que les comètes faisaient partie du monde sublunaire, et même qu'il s'agissait de phénomènes atmosphériques... L'angle mesuré valait au mieux 0,5 minute d'arc, la distance correspondante vaut alors: # 2 millions de km.
Les parallaxes Géocentriques.
Le but est d'utiliser la base la plus longue possible pour accéder à des objets toujours plus lointains. On a alors eu l'idée d'utiliser le diamètre de la Terre (12756km) en plaçant deux observateurs aux antipodes l'un de l'autre. De cette manière la distance Terre-Lune a pu être affinée, et Vénus par exemple a été atteinte. Mais la base est encore beaucoup trop courte pour que les étoiles se laissent capturer. Donc, comment faire pour trouver une base encore plus longue sans pour autant quitter le plancher des vaches?...Et bien en se rappelant que la Terre tourne autour du Soleil et que deux positions T1 et T2 de celle-ci à 6 mois d'intervalle, sont séparées d'environ 300 millions de kilomètres.
Les parallaxes Héliocentriques.
Quant au fait que la Terre tourne autour du Soleil, bien avant Copernic (1473-1543) des gens commençaient à s'en douter sérieusement. Tycho Brahé, le meilleur observateur de l'époque restait inébranlable. Il était trop confiant dans la finesse de ses mesures, ce qui ne lui permit pas de voir que les étoiles proches semblent effectivement avoir un mouvement de balancement par rapport aux lointaines. En effet, le plus petit angle accessible à Brahé était d'environ 1 min d'arc, alors qu'il aurait fallu qu'il soit soixante fois plus petit...Pour sortir de l'impasse, il faudra attendre l'invention de lunettes très performantes, Brahé n'avait que ses yeux... Ce n'est qu'en 1838, qu'un Astronome Allemand, Friedrich Bessel (1784-1846) parvient à déterminer la distance d'une étoile. Il avait tenté sa chance sur une étoile du Cygne (61 Cygnus) et avait trouvé une parallaxe p=0,31" (!), ce qui n'était pas rien à obtenir... En fait 2 mois auparavant, Thomas Henderson avait capturé une proie plus "facile": Alpha du Centaure, en mesurant pour p une valeur de 0,75", mais avait attendu des vérifications qui permirent à Bessel d'avoir la primeur de l'évènement. Cette prise de conscience de l'énormité des distances interstellaires, a conduit à inventer de nouvelles unités de longueur: La plus connue est l'Année Lumière, définie comme étant la distance parcourue par la lumière pendant une année (environ 9461 milliards de kilomètres). Pourtant on préfère souvent lui substituer le "Parsec" qui a l'avantage d'être directement déductible de la parallaxe:
d(pc)=1/p"
Un Parsec vaut 3,26Al. Le Parsec est composé à partir des mots "PARallaxe" et "SEConde". Il est définit comme étant la distance à laquelle il faudrait se placer pour voir le rayon de l'orbite Terrestre sous l'angle de 1" d'arc. On peut facilement vérifier qu'avec les valeurs de Bessel et Henderson on trouve pour 61 du Cygne d = 3,2pc = 10,5Al et qu'en ce qui concerne Alpha du Centaure, cela donne d= 1,33pc = 4,3Al.
Jusqu'à quelle distance peut-on utiliser cette méthode? Jusqu'à ce que les instruments utilisés déclarent forfait...Ce qui se produit relativement tôt. En effet ne se trouve à moins d'un parsec de nous, aucune étoile dont la parallaxe est supérieure à 1". Il est plus difficile de mesurer la distance d'a du Centaure que d'évaluer le diamètre d'une pièce de 1 franc vue depuis 3,5km! Et n'oublions pas que c'est la plus proche étoile du Soleil... En résumé, plus on pourra déterminer de petits angles, et plus on pourra sonder l'espace lointain. Si les "anciennes" mesures permettaient d'obtenir une précision de 0,02", il est aujourd'hui possible d'atteindre 0,005". Cette imprécision conduit bien sûr à une incertitude sur la distance estimée. Pour donner un exemple, si l'on mesure p=0,02"+/-0,01" la distance calculée est alors comprise entre 30 et 100pc (ce que l'on appelle la "boîte d'erreur"). Or l'atmosphère empêche les astronomes d'avoir des images beaucoup plus précises que 1 à 0,5", on a alors recourt à des méthodes statistiques, intégrant les données de nombreuses images à temps de pose ultra-courts qui permettent d'avoir la précision décrite plus haut. Voici, grâce aux trois petits schémas suivants de quoi donner une idée des ordres de grandeurs des angles mesurés. (On se rapellera que 1° vaut 60'(minutes) d'arc et 1' vaut 60" (secondes) d'arc.
Depuis la surface de la Terre, cette limite de 0,005" est difficilement franchissable pour l'instant. C'est pour cette raison qu'a été envoyé un satellite, donc affranchi du flou artistique causé par les turbulences atmosphériques. Il s'appelle HIPPARCOS (pour "HIgh Précision PARallactic COllecting Satellite"). Après les problèmes de satellisations que l'on connait, l'engin a été capable de dépasser 50% de son programme de départ, avec une précision variant entre 0,002" et 0,001", ce qui dans le pire des cas, multiplie par 2,5 les distances mesurables "proprement", et donc par 2,53 =16 le nombre d'étoiles accessibles. (Voir les courbes montrant l'augmentation de la boîte d'erreur en fonction de la distance pour deux précisions de mesure)